19/12/2015

COMMENT DES PATRONS ASSOIFFÉS DE POUVOIR GARDENT LEUR POUVOIR


Management

Dans le royaume animal, c’est un comportement avéré : les chimpanzés occupant le sommet de la hiérarchie se montrent souvent hostiles envers les membres d’un rang inférieur qui seraient suffisamment puissants pour menacer leur autorité. Et ils divisent ces subordonnés pour les empêcher de former des coalitions.

Des travaux récents montrent que certains chefs emploient les mêmes méthodes. Charleen Case et Jon Maner, chercheurs à la Kellogg School of Management de l’Université Northwestern (Chicago), ont suivi un panel d’étudiants pour identifier les individus enclins à imposer leur autorité aux autres. Ils ont ensuite montré que lorsque ces individus se sentaient en situation d’insécurité, ils tentaient d’interdire aux plus doués de leurs « subordonnés » de se rapprocher et de former des réseaux coopératifs. Ainsi, au moment d’attribuer des places assises dans une salle, par exemple, ces leaders séparaient les subalternes les plus compétents de tous les autres. En procédant ainsi, ils annihilaient les interactions possibles entre pairs, propices à l’amélioration des performances du groupe. On leur avait pourtant fait savoir que la coopération entre subalternes serait un gage de succès collectif.

Ces résultats concernent spécifiquement les managers « motivés par le goût de la domination » et placés dans une position de pouvoir « instable » quand, par exemple, ils se trouvent dans des situations où leurs subordonnés ont suffisamment de pouvoir pour les destituer. Mais le champ d’application de ces observations va plus loin. Comme le soulignent les chercheurs, même s’ils sont davantage mus par d’autres facteurs – le désir d’être apprécié, par exemple – la plupart des leaders sont motivés, au moins partiellement, par le goût de la domination. Et beaucoup de situations de pouvoir, sinon toutes donnent à ceux qui les occupent un sentiment d’instabilité.

Une entreprise peut prendre diverses mesures pour empêcher ses managers de jouer aux chimpanzés dominants.

Premièrement, les rendre plus responsables devant le groupe. Durant l’étude de Case et Maner, les agissements des leaders n’étaient connus que d’eux et des chercheurs. Selon ces derniers, permettre aux supérieurs, pairs et subalternes d’être au courant de ce qui se passe mettra les managers sous contrôle. Deuxièmement, l’entreprise peut institutionnaliser la communication entre subordonnés, par exemple en organisant des réunions debout. Troisièmement, parce que, même si un leader motivé par le goût de la domination a de meilleures chances de prendre de bonnes décisions quand ses équipes rivalisent avec d’autres groupes, l’entreprise doit instituer des compétitions amicales au sein de ses équipes. Enfin, elle s’assurera que ses managers se sentent sécurisés dans leur fonction : aucune situation n’est plus dangereuse pour la cohésion d’un groupe qu’un manager qui se sent menacé.


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