21/09/2019
19/09/2019
La CIA a eu pendant dix ans une taupe au Kremlin
Cet agent, ex-filtré en 2017, a fourni aux Américains des informations émanant directement du bureau de Poutine.
La maison de l'espion Russe |
Pendant plus de dix ans, un espion de la CIA infiltré au plus haut niveau de l’État russe a fourni aux Américains des informations émanant directement du bureau de Vladimir Poutine. Cette affaire d’espionnage, tout droit sortie de la guerre froide, a éclaté lundi, lorsque CNN a révélé que les services secrets américains avaient exfiltré clandestinement en 2017 l’un de leurs agents en Russie, par crainte d’une indiscrétion de Donald Trump. La chaîne américaine ne mentionne pas le nom de l’espion. Mais, de façon inhabituelle, les médias russes ont dévoilé presque aussitôt le nom du transfuge.
L’espion s’appelle Oleg Smolenkov. Comme les meilleures taupes, ce diplomate aurait été recruté au début de sa carrière, vraisemblablement entre 2006 et 2008, alors qu’il occupe le poste de deuxième secrétaire de l’ambassade de Russie à Washington. L’ambassadeur de l’époque, Youri Ouchakov, en poste pendant dix ans dans la capitale américaine, est l’un des poids lourds de la diplomatie russe. Appréciant Oleg Smolenkov, il l’entraîne dans son sillage lorsqu’il rentre à Moscou. Spécialiste des États-Unis, Ouchakov devient en 2008 conseiller pour les affaires étrangères de Vladimir Poutine, alors premier ministre. Il conserve son poste quand Poutine redevient président, en 2012. Bras droit et principal collaborateur d’Ouchakov, Smolenkov s’installe avec lui au Kremlin, où il a accès aux rapports secrets destinés à Poutine, notamment ceux des services de renseignement russes, le FSB.
La présence d’un agent au cœur du pouvoir russe est d’autant plus précieuse pour les Américains que Vladimir Poutine, lui-même ancien agent de renseignement passé par l’école du KGB, est plus prudent que la plupart des chefs d’État. Ses communications sont particulièrement difficiles à intercepter. Il utilise des téléphones filaires, se méfie d’Internet, et reçoit ses rapports par écrit, apportés dans des dossiers de cuir.
Smolenkov, qui a accès au bureau de Poutine, aurait ainsi pu photographier des documents confidentiels destinés au président russe. Alors que les relations entre la Russie et les États-Unis se tendent sur la scène internationale, de l’Ukraine à la Syrie, il devient rapidement l’une des principales sources d’in formation des Américains sur les intentions de Moscou. La méfiance entre les deux pays atteint un point culminant en 2016, lorsque la CIA soupçonne la Russie d’ingérence dans la campagne présidentielle américaine. D’après le New York Times, les renseignements fournis par Smolenkov permettent d’établir avec certitude que l’opération a été décidée et dirigée par Poutine lui-même.
Dans l’univers du renseignement, une taupe court trois risques ; celui, peu fréquent, d’être pris en flagrant délit ; celui d’être démasqué par un agent infiltré dans son propre camp ; ou celui d’être victime d’une indiscrétion, générale ment la divulgation d’informations permettant de remonter jusqu’à leur source. Pour éviter ce risque, la CIA remet séparément au président Obama les rapports de Smolenkov, au lieu de les intégrer à la synthèse quotidienne du renseignement.
Mais cette précaution devient soudain inutile avec l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier 2017. La CIA s’inquiète très vite de la légèreté avec laquelle le nouveau président traite les informations confidentielles, ainsi que de ses rapports cordiaux avec Vladimir Poutine et les Russes. En mai de la même année, lorsqu’il reçoit à la Maison-Blanche le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et l’ambassadeur de Russie à Washington, Trump mentionne dans la discussion des informations ultrasecrètes sur l’État islamique en Syrie, pourtant classifiées au point de n’être même pas partagées avec les pays alliés. Pour Smolenkov, le danger vient dorénavant du plus haut ni veau de l’appareil d’État américain. La CIA juge que le risque est trop grand devoir son agent involontairement démasqué par le président. La décision est prise de l’exfiltrer.
Smolenkov refuse d’abord, faisant craindre aux Américains qu’ils sont victimes d’un agent double. Mais à la deuxième proposition, il accepte de quitter la Russie. En juin 2017, Oleg Smolenkov, sa femme, Antonina, et leurs trois enfants partent en vacances au Monténégro. Ils disparaissent sans
laisser de traces. Du jour au lendemain, leurs comptes sur les réseaux sociaux deviennent muets. La Russie ouvre une enquête pour meurtre, avant de refermer le dossier faute d’éléments. Pendant deux ans, les Smolenkov semblent s’être volatilisés.
La suite est plus étrange. Aussitôt après les révélations de CNN, son nom est rendu public par le quotidien russe Kommersant. Après une rapide recherche, des journalistes américains découvrent qu’un certain Oleg Smolenkov vit avec sa femme et ses enfants dans une maison cossue à Stafford, en Virginie. Sur les lieux, les journalistes sont accueillis par des agents du gouvernement américain en civil. Selon les voisins, la famille a disparu précipitamment dès lundi soir, laissant des vêtements et des jouets d’enfants traîner dans le jardin.
Comme souvent dans les affaires d’espionnage, les sources sont anonymes et beaucoup d’informations invérifiables. Beaucoup de questions demeurent. En particulier celle de savoir pourquoi, s’il a bien été exfiltré par la CIA, Smolenkov vivait sous sa véritable identité, à une heure de voiture de Washington, localisable en quelques minutes via Internet.
Ou bien la raison pour laquelle sa défection a été rendue publique deux ans après les faits, par l’une des plus grandes chaînes d’information américaines.Mais les démentis énergiques des protagonistes semblent indiquer la véracité d’une bonne partir de l’histoire de Smolenkov. Du côté américain, la CIA a aussitôt exclu avoir pu prendre la décision d’exfiltrer un espion sur la base d’un manque de confiance à l’égard du président des États-Unis. « Cette histoire est factuellement fausse », a commenté Mike Pompeo, l’actuel secrétaire d’État américain, qui fut le directeur de la CIA à l’époque des faits. Du côté russe, les officiels se sont empressés de minimiser le rôle de Smolenkov. Le porte-parole du Kremlin, Dimi tri Peskov, a confirmé que l’espion avait bien travaillé au sein de l’administration présidentielle, mais démenti que ça été « au plus haut niveau », c’est-à-dire à un poste dont les titulaires sont nommés par le président et qui ont directement accès à lui. Il a ajouté, sans préciser la date, que Smolenkov avait été démis de ses fonctions dans l’administration présidentielle. « Toutes ces spéculations dans les médias américains, selon les quelles quelqu'un aurait exfiltré quelqu'un et ainsi de suite, relèvent du romanà sensation, a dit Peskov. Nous les leur laissons... Le contre-espionnage russe fonctionne parfaitement.laisser de traces. Du jour au lendemain, leurs comptes sur les réseaux sociaux deviennent muets. La Russie ouvre une enquête pour meurtre, avant de refermer le dossier faute d’éléments. Pendant deux ans, les Smolenkov semblent s’être volatilisés.
La suite est plus étrange. Aussitôt après les révélations de CNN, son nom est rendu public par le quotidien russe Kommersant. Après une rapide recherche, des journalistes américains découvrent qu’un certain Oleg Smolenkov vit avec sa femme et ses enfants dans une maison cossue à Stafford, en Virginie. Sur les lieux, les journalistes sont accueillis par des agents du gouvernement américain en civil. Selon les voisins, la famille a disparu précipitamment dès lundi soir, laissant des vêtements et des jouets d’enfants traîner dans le jardin.
Comme souvent dans les affaires d’espionnage, les sources sont anonymes et beaucoup d’informations invérifiables. Beaucoup de questions demeurent. En particulier celle de savoir pourquoi, s’il a bien été exfiltré par la CIA, Smolenkov vivait sous sa véritable identité, à une heure de voiture de Washington, localisable en quelques minutes via Internet.
16/09/2019
15/09/2019
Le futur commissaire européen a la justice impliquée dans des affaires de corruption et de blanchiment
Le parquet belge enquête sur des allégations de corruption visant Didier Reynders. Une information judiciaire a été ouverte à la suite de l’audition d’un ex-agent de la Sûreté de l’État. Il a fallu a cet agent quitté le service pour dénoncer les faits a la justice alors que durant des années par la sûreté de l'état était bel et bien au courant des affaires de corruption impliquant le futur commissaire européen a la justice.
Didier Reynders devra notamment accompagner l'installation du nouveau parquet européen anticorruption, développer la coopération judiciaire et renforcer l'État de droit dans les pays de l'Union. |
La Justice mène une enquête visant le vice- Premier ministre et ministre des Affaires étrangères et de la Défense, Didier Reynders (MR), comme nous l’a confirmé le parquet de Bruxelles. L’information judiciaire a été ouverte après qu’un ancien agent secret de la Sûreté de l’État s’est rendu, en avril der- nier, à la police judiciaire fédérale pour lui communiquer une série d’allégations de corruption et de blanchiment à l’encontre de Didier Reynders. Les accusations étaient dirigées également contre un fidèle de Reynders, qui était encore à l’époque conseiller à son cabinet.
Le parquet de Bruxelles se refuse à préciser les actes judiciaires qu’il a déjà entrepris ces derniers mois dans le cadre de ce dossier, mais déclare «que l’enquête suit son cours» et que aucun devoir d'instruction n'a été accompli encore aujourd'hui. Au terme de l’enquête préliminaire, le parquet devra décider si les indices contre Reynders sont suffisants et si le dossier doit être transmis ou non au parquet général de Bruxelles, compte tenu de la qualité de ministre de Reynders.
Notre rédaction a pu consulter le procès-verbal établi par la police au sujet de l’audition de l’ex-agent de la Sûreté de l’État. On y lit que l’homme en question a travaillé du 1er mars 2007 au 1er mars 2018 pour le service de renseignements et de sécurité du pays, principalement au sein de sa section économique. Dans le cadre de sa fonction, l’ancien agent secret prétend avoir pris connaissance, grâce à ses informateurs et ses propres investigations, de différentes pratiques de corruption et de blanchiment.
Dans son audition, l’ex-agent de la Sûreté de l’État pointe une série de marchés publics et d’achats de l’État, tels que la construction de l’ambassade belge à Kinshasa, pour lesquels des pots-de-vin ont été versés, selon lui. Dans sa déposition, il cite également des corrupteurs, comme des marchands d’armes, et un candidat à l’élection présidentielle congolaise. Pour chaque accusation, l’ancien agent secret donne également les noms d’autres personnes et entreprises impliquées.
Lors de son audition, l’ex-agent de la Sûreté de l’État a décrit les méthodes que Reynders et son homme de confiance auraient utilisées pour recevoir de l’argent et le blanchir. Il y est question notamment de vente à des prix surfaits d’œuvres d’art et d’antiquités sans grande valeur. L’ancien agent secret prétend qu’un antiquaire impliqué dans ce blanchiment lui aurait déjà fait des confidences à ce sujet. Parmi les autres méthodes citées, épinglons aussi des transactions immobilières. Le conseiller de Reynders serait devenu ainsi le propriétaire de nombreux logements, un patrimoine impossible à justifier sur la base de ses revenus officiels.
Autre voie de blanchiment pointée par l’ex-agent de la Sûreté de l’État: des transactions passant par des sociétés-écrans dans des paradis fiscaux. Dans son audition, il cite le nom d’un Néerlandais qui y aurait contribué via des sociétés offshore et celui d’un haut fonctionnaire qui pourrait en dire plus à ce sujet à la Justice.
Seuls le parquet de Bruxelles et les inspecteurs de police peuvent à présent établir la véracité des déclarations (détaillées) de l’ancien agent secret.
Rapports secrets
Notre rédaction a pu consulter cependant cinq rapports secrets que l’ex-agent de la Sûreté de l’État a rédigés durant ses années de fonction. Ces notes, enregistrées dans la banque de données de l’organe de renseignements de l’État, remontent déjà aux années 2009, 2010 et 2011. Elles confirment en tout cas que l’ancien agent pointait déjà les supposées pratiques de corruption dénoncées aujourd’hui à la Justice.
Ces cinq rapports secrets de la Sûreté de l’État mentionnent déjà une série de noms ainsi que les « astuces » pour blanchir l’argent de la corruption (les transactions factices sur le marché de l’art).
Les cinq rapports sont des documents officiels confidentiels de la Sûreté de l’État. Mais ils n’ont pas valeur de preuve. Ils contiennent des « informations brutes » que la Sûreté de l’État a recueillies auprès de différents informateurs. Dans une de ces notes, on peut lire ainsi qu’un des informateurs est un fonctionnaire haut placé dans un service public fédéral concerné. Pour autant que nous le sachions, la Sûreté de l’État n’a pas transmis à l’époque ces informations à la Justice.
La réaction de John Hendrickx, le porte- parole de Reynders, est brève: «Il s’agit sans doute à nouveau d’un montage émanant du même homme malveillant qui tente sans cesse de nuire.» Didier Reynders est actuellement candidat au poste de commissaire européen à la Justice.
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