13/10/2020

Des éléments secrets de l’accord UE-Mercosur

Greenpeace révèle le contenu de l’Accord entre l’UE et les pays du Mercosur, et déplore que la lutte pour le climat et la biodiversité n’y soient pas des «éléments essentiels».

L’accord commercial entre l’Union européenne et les pays latino-américains du Mercosur a du plomb dans l’aile, et la fuite de l’Accord d’associa- tion qui l’encadre ne risque pas de l’aider à prendre son envol.

«Il manque deux éléments à presque tous les aspects de protection environnementale et climatique dans l’accord: un engagement contraignant et une force exécutoire», observe l’ONG environnementale Greenpeace, qui a obtenu et diffuse ce vendredi une version de cet accord datée du 18 juin.

Légitime, pas essentiel

Ainsi, ni la lutte contre le réchauffement climatique ni la protection de la biodiversité n’ont le statut d’«élément essentiel» de l’accord, contrairement au respect des principes démocratiques, ou à l’engagement à mettre en œuvre les traités de non-prolifération d’armes nucléaires. Or ce statut est un puissant levier puisque si l’une des parties considère qu’une autre contrevient à un tel élément, elle peut prendre des «mesures appropriées», y compris – en dernier resort – la suspension partielle ou complète du traité. En mai dernier, la France et les Pays-Bas avaient demandé de faire de l’Accord de Paris sur le climat un «élément essentiel» de tout accord de commerce européen – y compris ceux en cours de négociation.

La protection de l’environnement n’est pas davantage classée parmi les «principes directeurs» de l’accord, comme l’est le développement économique et social. Elle est reléguée aux «objectifs politiques légitimes», en vertu desquels les parties ont pleinement le droit de réguler.

Cette semaine, le Parlement européen s’est opposé à la ratification de l’accord UE-Mercosur, mais sans que les élus aient connaissance du volet dévoilé aujourd’hui. «La transparence n’est pas de mise, il est incroyable qu’on ait connaissance des dossiers via des fuites», indique l’écologiste Saskia Bricmont, seule eurodéputée belge francophone membre de la commission du Commerce international (Inta).
Inquiet de la politique environnementale du président brésilien Jair Bolsonaro, en contradiction avec les engagements de l’Accord de Paris, le Parlement européen «souligne que, dans ces conditions, l’accord UE-Mercosur ne peut être ratifié en l’état», indique la résolution adoptée mercredi.

Les directives de négociation de l’Union européenne avec les quatre pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay) ont été définies en 1999, un accord politique a été annoncé vingt ans plus tard. Son volet commercial doit lever la majorité des taxes sur les exportations européennes (4 milliards d’euros par an), il reconnaît 350 indications géo-graphiques protégées européennes et ouvre les marchés publics aux entreprises, notamment.

Sérieux doutes

L’accord est depuis longtemps la cible d’attaques soutenues de la société civile, et notamment des associations de défense de l’environnement. «Il est tout à fait possible de faire des accords commerciaux qui garantissent la justice sociale et répondent à la crise du climat et de la biodiversité, mais on est face à un accord du siècle dernier, inconsistant avec la stratégie européenne du Pacte vert», abonde Matteo De Vos, chargé de campagne chez Greenpeace.

Depuis un an, les remises en cause se multiplient chez certains décideurs politiques européens. À l’été 2019, Emmanuel Macron annonçait retirer son soutien au traité, dénonçant l’inaction du Brésil, en matière de climat et de biodiversité. Il a été soutenu par l’Irlande et le Luxembourg. Le parlement autrichien a voté contre l’accord commercial, suivie de celui des Pays-Bas, mais aussi en Belgique des instances wallonnes et bruxelloises. Et en août, en pleine présidence allemande de l’UE, c’est la chancelière Angela Merkel qui a émis de «sérieux doutes» sur l’avenir de l’accord, dont devait pourtant débattre bientôt le Conseil.

Vendredi dernier, le commissaire au Commerce Valdis Dombrovskis a lui aussi émis des réserves: «Nous allons avoir besoin de résultats, d’engagements substantiels de la part des pays du Mercosur avant de pouvoir procéder à la ratification», reconnaissant aussi que la mise en œuvre des chapitres sur le développement durable des autres accords commerciaux passés par l’Union «n’est pas suffisamment forte».

L’Accord d’association avec le Mercosur doit être adopté par tous les parlements nationaux européens. Si le volet commercial est scindé en un traité distinct, celui-ci pourrait être adopté à la majorité par les législateurs européens. 

22/06/2020

Un logiciel espion contre un journaliste marocain qui dérange


Une enquête d’Amnesty International révèle que l’iPhone d’Omar Radi a été infiltré avec la technologie de la société israélienne NSO


Pour un journaliste ou un militant, rien n'est plus senssible qu'un téléphone portable. Ses sources, ses projets d'enquetes, ses secrets, sa vie intime... tout y est méthodi­quement consigné. Y accéder, le mettre à nu, c’est offrir la possibi­lité de le réduire au silence. Depuis une dizaine d’années, l’industrie opaque de la cybersur­veillance s’est engouffrée dans cette brèche et fait peser une me­nace grandissante sur les journa­listes et les défenseurs des droits de l’homme. Officiellement desti­nées à lutter contre le terrorisme ou la cybercriminalité, leurs tech­nologies, capables de contourner les protections informatiques les plus sophistiquées, sont sou­vent détournées par les Etats qui les achètent pour espionner leurs opposants. L’histoire du journa­liste marocain Omar Radi en est un exemple édifiant.
En avril 2019, ce journaliste d’in­vestigation marocain, très connu dans son pays et poil à gratter du régime, se fend d’un Tweet au vi­triol. Alors que la justice de son pays vient de condamner des membres du mouvement de contestation du Hirak à de lour­des peines de prison, il s’en prend frontalement au magistrat qui a prononcé les peines, le qualifiant de « bourreau ». « Ni oubli ni pardon avec ces fonctionnaires sans dignité ! », écrit­ il. Rapidement, les autorités ouvrent une enquête pour outrage à magistrat et en­tendent le journaliste. En décem­bre 2019, il est inculpé puis incar­céré, déclenchant une vague de protestations au Maroc, chez les ONG et sur les réseaux sociaux. Il a été condamné en mars à quatre mois de prison avec sursis.

Logiciel sophistiqué

Alors même qu’il était inquiété par la police, son téléphone a été discrètement infiltré par le très sophistiqué logiciel d’espionnage Pegasus, révèle aujourd’hui une enquête de l’ONG Amnesty Inter­ national. Dans un rapport très dé­taillé, fourni en avant­ première au collectif de médias Forbidden Stories, dont Le Monde, le Guardian, la Süddeutsche Zeitung, Die Zeit, Radio France, et le Washing­ ton Post, Amnesty dénonce l’im­plication de la société israélienne NSO, fabricant du logiciel Pegasus.

L’analyse de l’iPhone de M. Radi montre qu’il a été ciblé à plusieurs reprises, depuis début 2019 et jus­qu’à janvier 2020, par des pirates, qui ont laissé des traces techni­ques très proches de celles retrouvées précédemment par Am­nesty International sur les télé­ phones de militants des droits de l’homme au Maroc. Pour l’ONG, ces traces, et plus largement l’in­frastructure technique utilisée pour lancer l’attaque sur l’iPhone de M. Radi, pointent dans une seule direction : la société NSO.

NSO est loin d’être le seul mar­chand d’armes du monde numé­rique. Elle est, cependant, la tête de proue de cette nouvelle indus­trie, sans doute parce qu’elle en est un exemple parfait. Elle a été fondée en Israël, comme tant de ses homologues, là où la porosité entre les services de renseigne­ment « cyber » – parmi les meil­leurs au monde – et le milieu des start­up est totale. Elle consacre aujourd’hui de gigantesques ef­forts de recherche pour identi­fier les interstices dans les pro­duits numériques susceptibles de laisser passer ses logiciels es­pions. Ainsi est­ elle accusée par Facebook d’avoir utilisé une faille dans la messagerie Whats­ App (qui appartient au réseau so­ cial) pour « infecter » des centai­nes de victimes.

Elle est surtout régulièrement accusée de vendre ses outils à des régimes peu sensibles à la question des droits de l’homme ou de fermer les yeux lorsqu’ils sont uti­lisés contre des dissidents ou des militants. L’entreprise est aussi ac­cusée d’être impliquée dans la sur­veillance électronique du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, que des hommes envoyés par Riyad ont assassiné et démembré dans le consulat de l’Arabie saou­dite à Istanbul (Turquie), en 2018.

Pegasus, connu pour être le produit­ phare de NSO, est réputé être le nec plus ultra des logiciels d’espionnage de téléphones por­tables. Les fonctionnalités exac­tes ne sont pas toutes connues, mais Pegasus serait capable d’as­pirer tout le contenu – messages, enregistrements sonores, photos, activité Web, etc. – du téléphone sur lequel il est installé.

Amnesty International n’a pas trouvé de trace directe de la présence de ce logiciel sur le téléphone d’Omar Radi. Comme des policiers constatant la ser­rure forcée par un cambrioleur, l’ONG est, cependant, parvenue à retrouver la porte d’entrée, révé­lant les marques de NSO, utilisée pour infecter le téléphone.

Les éléments techniques re­cueillis par l’ONG montrent qu’il s’agit de voleurs extrêmement compétents, puisque le logiciel malveillant a été installé sans aucune action de la part d’Omar Radi. Dans la vaste majorité des cas, les logiciels espions ont be­soin que la personne ciblée clique sur un lien ou un fichier pour s’installer sur leur téléphone.

Dans le cas du journaliste marocain, les assaillants ont très vraisemblablement intercepté au vol sa navigation Internet et remplacé un site Web qu’il sou­haitait consulter par une page contenant le virus. Cette techni­que, dite d’« injection réseau », «est, en un sens, plus insidieuse et plus difficile à identifier et à dé­ jouer, car elle ne laisse pas vrai­ment de traces », explique Claudio Guarnieri, qui dirige le laboratoire de sécurité d’Amnesty Internatio­nal, et a étudié l’appareil d’Omar Radi. « Tout se passe de manière quasiment invisible. »

Réaliser ce type d’attaque n’est possible que dans deux cas : soit avec la collaboration de l’opé­rateur téléphonique de la victime, soit en ayant recours à des équi­pements d’espionnage de proxi­mité conçus pour intercepter le trafic du téléphone « à la volée ». Des équipements que NSO a jus­tement déjà présentés dans cer­tains salons professionnels. Dans les deux cas, il faut disposer de moyens importants, ou de com­plices très haut placés, pour par­ venir à installer de la sorte un lo­giciel espion sur un smartphone.

Les soupçons d’Amnesty se portent sans surprise sur les ser­vices de sécurité marocains : l’en­treprise NSO ne fournit officielle­ment son service d’espionnage, très onéreux, qu’aux Etats et aux forces de sécurité. Et M. Radi, qui a publié plusieurs enquêtes sur la corruption au Maroc, couvrait no­tamment les manifestations anti­ gouvernementales dans la région du Rif. C’est d’ailleurs pour son Tweet dénonçant la condamna­tion à des peines de prison de mi­litants de ce mouvement qu’il a été condamné à la mi-­mars.

« Je m’en doutais un peu »

Les éléments techniques recueillis par Amnesty International mon­trent que son téléphone a été attaqué dans les jours suivant son in­culpation, après une première offensive en début d’année 2019. Les autorités marocaines n’ont pas donné suite aux sollicitations du consortium Forbidden Stories.

Lorsque Amnesty a expliqué à Omar Radi qu’il avait été mis sous surveillance, cela ne l’a pas véritablement surpris : « Je m’en doutais un peu. Les autorités ma­rocaines sont acheteuses de toutes les solutions possibles et imagina­bles de surveillance et d’espion­nage. Elles veulent tout savoir », a expliqué Omar Radi dans un entretien réalisé par le collectif Forbidden Stories au nom de tous les médias partenaires.

Les révélations d’Amnesty vont relancer un débat lancinant, celui d’une industrie opaque dont les productions sont régu­lièrement utilisées contre des journalistes ou des militants des droits de l’homme.

Sollicité par les membres de For­bidden Stories, un porte­parole de NSO a refusé «de confirmer ou d’infirmer le fait que les autorités en question ont utilisé [leur] tech­nologie », citant des accords de confidentialité avec ses clients. Utilisant des termes rarement employés par l’entreprise, ce por­te­parole s’est, cependant, dit « profondément troublé » par les révélations d’Amnesty Internatio­nal. « Nous étudions ces informa­tions et lancerons une enquête si nécessaire », a­ t­'il poursuivi.

« En accord avec notre politique en matière de droits de l’homme, NSO prend au sérieux notre responsabilité de protection de ces derniers. Nous nous sommes engagés à éviter de causer, de contribuer ou d’être directement liés à des impacts négatifs sur les droits de l’ homme », explique­ t­on de même source.

En 2019, après son rachat par le fonds d’investissements britan­nique Novalpina Capital, NSO s’était, en effet, engagée à mettre sur pied un «comité de la gou­vernance, des risques et du respect des règles juridiques ». Trois jours après l’annonce de ces « nouvel­ les règles pour la protection des droits de l’homme», le téléphone d’Omar Radi était pourtant visé par un logiciel espion.

29/04/2020

Libre-échange: l’UE signe un accord avec le Mexique

La Commission européenne a annoncé ce mardi l’aboutissement des négociations pour un accord de libre-échange entre l’UE et le Mexique, lancées en 2016. Malgré la crise du Covid-19, le libre- échange reste un pilier de l’Union.

La Commission européenne a apporté ce mardi 28 avril la preuve que la pandémie en cours ne remettait en cause aucune de ses certitudes en matière de libre- échange : son commissaire au commerce, le conservateur irlandais Phil Hogan, a annoncé l’aboutissement des négociations d’un accord de libre-échange avec le Mexique, lancées en 2016.

« Tandis que la plupart de nos efforts des derniers jours portaient sur la crise du coronavirus, nous avons aussi fait avancer notre agenda pour un libre-échange ouvert et juste, un agenda qui reste très important », s’est réjoui Hogan. Un accord intermédiaire avait été conclu en 2018. Le parcours reste encore long, avant une éventuelle entrée en vigueur de ce nouvel accord : la mise en conformité juridique du texte consolidé – qui peut prendre de longs mois –, puis sa ratification, au Parlement européen, puis par chacune des capitales de l’UE.

Le Mexique, qui compte 128 millions d’habitants, est le deuxième partenaire commercial de l’UE en Amérique latine, après le Brésil. Les partisans du texte assurent que 400 000 emplois dans l’UE dépendent déjà, directement ou non, des exportations européennes vers le Mexique, et que ce nombre progressera dans les années à venir. Cet accord de libre- échange, qui prévoit, selon l’exécutif européen, le respect de l’Accord de Paris, a valeur de test, alors que l’avenir du texte de libre-échange en chantier entre l’UE et le Mercosur (dont le Brésil et l’Argentine), semble bien incertain.

Les journaux vous expliquait comment Hogan mettait la pression sur certains de ses services pour boucler des accords, en pleine pandémie. Alors que la crise du Covid-19 relance les débats sur la nécessité d’une « démondialisation », Phil Hogan a défendu une nouvelle fois, dans un entretien au Financial Times le 23 avril, les vertus du libre-échange à ses yeux : « L’autonomie stratégique ne signifie pas que nous devons faire de l’auto-suffisance notre objectif. » Et d’insister : « Étant donné la complexité des chaînes d’approvisionnement de l’Union européenne, ce serait un objectif impossible à atteindre. »

Au Parlement européen, les délégations du PPE (dont LR) et Renew (dont Renaissance - LREM) se sont félicités de cet accord, mardi en fin d'après-midi, la première y voyant une « lueur d'espoir » dans la crise en cours.

24/03/2020

Le Covid­19, nouvel acteur sur la scène mondiale du pétrole


Dans le sillage de l’épidémie, qui a fait chuter la demande pétrolière en Chine, l’Arabie saoudite et la Russie remettent en cause leur alliance pétrolière et s’attaquent aux Etats­Unis




Covid 19
Covid 19 

20/03/2020

Les grands patrons spéculent sur l'effondrement de la Bourse

Les cours des actions plongent, les PDG du CAC 40 savent en profiter personnellement.

ASSEZ de pessimisme.Tout ne va pas si mal. à la Bourse. C’est, en tout cas, la leçon que donnent les grands patrons et banquiers qui rachete a tours de bras- et pour leur compte personnel - les
actions massacrées de leurs sociétés.
Depuis un mois, le CAC 40 s'est effondré de 35%. Certaines grandes valeurs - celles liées au tourisme, notamment au pétrole ou à la finance  - ont même perdu jusqu'à 75 % de leur valeur. Un drame ? Non. Plutôt l' occasion de faire de très bonnes affaires pour ceux qui ont les moyens d'acheter les actions qui sont aujourd'hui bradées -, commente un analyste.
De fait, la lièvre acheteuse des patrons s’est brusquement réveillée, a partir du 20 février, avec la chute libre du CAC. Ce n'est pas Bernard Arnault, le patron de LVMH, homme le plus riche du France - et, selon les cours du jour, du monde —, qui le contredira. Depuis le 1" janvier, la valeur de l'action de son groupe a baissé de pres de 30%. Cette chute ne l'a pas dissuade d’acheter, via ses sociétés personnelles Financière Jean Goujon, Financière Agache, quelque 160 000 actions autour de 350 euros - Soit emiion 25 % moins cher que leur valeur avant la crise. Economie pour ses finances : 20 millions.
Chez le groupe hôtelier Accor qui,  en deux mois, a perdu plus de 40 % de sa valeur, Sébastien Bazin, le pédégé, a acheté, le 12 mars, via sa holding Bazeo Europe, 50 000 actions a 23 euros l’une - contre 40 euros avant la chute. L’un des principaux administrateurs, Sarmad Zok, en a
raflé, quant à lui plus de 40 000, à environ 35 euros. Quant à Paul Dubrûle, cofondateur du groupe - et encore administrateur -. il a acquis 15 000 actions à environ 34 euros.

Finances bien gérées

Chez PSA, la famille Peugeot, qui possède 13 % du capital, ne s'est pas oubliée. La chute au cours (- 40 % en deux mois aurait dû la désoler ; elle lui a, au contraire, ouvert l'appétit. Sa holding patrimoniale FFP a annonce un plan d’achat de quelque 40 millions d actions, afin de tenter
de faire jeu égal avec la famille Agnelli, au terme de la fusion avec Fiat Chrysler. Une opération prévue de longue date mais qui. grâce à la chute de la Bourse, a commencé à se faire à très bon compte : 14 euros, au lieu de 20 il y a deux mois.
Autre famille très active dans la tourmente : la branche française des Rothschild. Alexandre et David - directement ou à travers la holding Concordia - ont racheté en deux jours, les 11 et 12 mars, 570 000 actions de la banque Rothschild & C’o pour un prix inférieur de plus d'un tiers à ce qu’il était un mois plus tôt (16.60 euros, contre 25.50).
Et pour faire bonne mesure, le gérant de la banque, François Pérol ex-secrétaire général de l'Elysée
sous Sarkozy, a aussi cotisé pour 10 000 actions, le 11 mars, mais à 17,40 euros. Histoire de ne pas vexer le patron en faisant un plus gros bénef ? Dans la finance, toujours, le patron de la BNP, Jean Lemierre, a acheté, les 8 et 13 mars 5 000 titres de sa boite à environ 34 euros, alors qu'ils en valaient 50 un mois plus tôt. Le directeur général, Jean-Laurent Bonnafé, s’est offert, lui aussi, 10 000 actions, mais à un prix légè­rement supérieur : 38 euros.
Chez Dassault, on spécule en famille : Groupe industriel Marcel Dassault, la holding familiale, a acquis quelque 160 000 actions Dassault Systèmes au prix moyen d'environ 135 euros, soit 15 % de moins que deux semaines auparavant. D’autres membres de la famille - Laurent, le président du groupe, et Catherine et François, administrateurs - se sont partagé un peu plus de 10 000 actions au même prix.
De nombreux dirigeants de boîtes dans le luxe (Hermès), la distribution Fnac, Carrefour, le BTP (Vinci, Eiffage/, l’immobilier Unibail), la comunication (Vivendi), la communication (Vivendi), l'alimentation ( Pernod, les services ( Veolia), la banque (Société générale) ou l’industrie Renault ont aussi profité de la manne boursière. Connaissant parfaitement leur groupe et étant en quelque sorte des initiés, ils ne font pourtant rien d'illégal.
Il est en tout cas rassurant de constater que ces patrons sont convaincus que la Bourse gagnera la
guerre contre le virus.

26/02/2020

D’anciennes gloires des Affaires étrangères ne sont pas étrangères aux affaires...

Appâtés par de plantureuses rémunérations, beaucoup d’anciens ambassadeurs mettent leurs carnets d’adresses au service de boîtes françaises mais aussi — plus délicat — d’autres Etats.


PASSER du Quai d’Orsay au privé ? Pour les éminences du ministère des Affaires étran­gères, la commission de déontologie chargée de réguler le pantouflage se montre particulièrement... diplo­mate. Normalement, un ancien re­présentant de la France en Bordurie moldo-valaque devenu businessman n'a pas le droit de commercer avec ce pays pendant trois ans après la fin de ses fonctions. Mais la commis­sion ferme souvent les yeux. Surtout, comme le montrent les exemples qui suivent, lorsque l’intéressé porte à vie le titre rare et prestigieux d’ambassadeur de France.

Etats de services au service d’Etats

En quarante ans de carrière, Gé­rard Errera, 76 ans, a enchaîné les postes prestigieux : ambassadeur au Royaume-Uni, auprès de l’Otan à Bruxelles, secrétaire général du Quai d’Orsay. En 2009, quand il annonce qu’il prend la présidence de la filiale française du fonds géant d’investis­sement américain Blackstone, la commission de déontologie tamponne son visa.

Plus rare. Errera, ex-secrétaire gé­néral du Quai sous Bernard Kouch­ner, a accepté de siéger au comité consultatif de Huawei International. Autrement dit au service du gouver­nement chinois... Voilà donc un lobbyiste supplémentaire pour le cador des télécoms, qui à tout prix tente d’imposer ses équipements 5G en France et au-delà en Europe.

Carnet d’adresses dans la valise diplo

Moins voyante mais très rentable, l’arrivée de Loïc Hennekinne, 79 ans, ex-ambassadeur à Rome, au sein du conseil d’administration de l’assureur italien Generali, révélée par Vincent Jauvert dans « La Face cachée du Quai d’Orsay ».

Naguère ambassadeur en Haïti, l’ancien coordonnateur du Rensei­gnement Didier Le Bret, 56 ans, en pince quant à lui pour l’intelligence économique. Chez ESL & Network (qui compte parmi ses clients des Etats étrangers tel le Cameroun), « il a eu accès à des informations confidentiel défense, et cette reconversion ne semble choquer personne », s’of­fusque un expert de l’Afrique.

Une bonne dizaine d’ambassadeurs à la retraite se sont dotés de leurs propres structures de conseil aux en­treprises. Souvent lucratives... En 2018, JDL Conseil, la boîte fondée par Jean-David Levitte, 73 ans, l’ex-sherpa de Nicolas Sarkozy, a réa­lisé un chiffre d’affaires de près de 1 million d’euros. Celui d’Alain Azouaou Advisors s’élève en 2017 à 1,726 million. Son fondateur, Alain Azouaou, 67 ans, ex-ambassadeur aux Emirats arabes unis, n’a pas prê­ché dans le désert...

Pas plus que Bertrand Besancenot, 67 ans, qui durant neuf ans (un record) a dirigé notre représentation en Arabie Saoudite. Début 2019, il a créé la société Palmelys. Après les cheikhs, les provisions.

Jean-Marc Simon (Côte d’ivoire), Jean de Gliniasty (Russie) et Pierre Menât (Pays-Bas) avaient déjà ouvert la voie du business. Men­tion spéciale à Thierry Dana, 63 ans, pionnier du rétro-pantouflage diplomatique. Directeur Asie du Quai, puis représentant personnel du président Chirac à Pékin, il lance, en 2005, TD Conseil, destiné aux boîtes françaises souhaitant s’instal­ler en Chine.
Dix ans plus tard, il revient dans la carrière grâce à Laurent Fabius, oui le nomme ambassadeur au Japon. Banzai 

Visa pour les boîtes françaises

Ambassadeur au Japon, au Royaume-Uni, en Allemagne et en Chine, ex-conseiller diplomatique de Jacques Chirac, Maurice Courdault Montagne, 66 ans, rêvait d’une seconde vie. Le 19 décembre 2019, il a créé la société de conseil MGM-GO (Global Outlook). Avant d’être nommé le 20 janvier 2020 par le Gifen (syndicat professionnel des entreprises du nucléaire, dont EDF, Orano, etc. ) président du salon World Nuclear Exhibition. Il avait siégé au conseil d’administration d’EDF. Cela ferait-il de lui un éminent expert de l’atome ?

A peine ses trois années d’ambas­sadeur en Inde achevées, Alexandre Ziegler, 50 ans, ex-directeur de ca­binet de Laurent Fabius au Quai d’Orsay (2013-2016), s’est laissé en­rôler, le 29 août 2019, comme direc­teur des relations institutionnelles du groupe de défense Safran. Même garde-à-vous pour Marion Paradas, 59 ans, ambassadrice en Slovénie. En 2018, elle est devenue vice-pré­sidente du groupe d’électronique mi­litaire Thaïes.

Spécialisé dans le recyclage (écolo), le groupe Suez n’a pas eu de mal, en 2017, à convaincre Jacques Audibert, 59 ans, ex-sherpa de François Hollande, d’endosser le poste de se­crétaire général. De son côté. Ponant, propriété de François Pinault, a offert en 2018 à Bruno Joubert (69 ans), ancien ambassadeur du Maroc et conseiller Afrique de Chirac, un titre de « senior advisor pour les questions institutionnelles et internationales ». Un an plus tôt, l’armateur de porte-conteneurs CMA CGM avait embar­qué Georges Serre - 67 ans, am­bassadeur au Congo, au Cameroun et en Côte d’ivoire - , pour en faire son conseiller Afrique et relations institutionnelles.  Ces fins diplomates savent navi­guer à vue...

Un ambassadeur multi-passeport

CHRONIQUEUR au « Point » et sur France Inter, ex-ambassadeur à Tel-Aviv et à New York, Gérard Araud. 66 ans (dont trente-sept au Quai d’Orsay).travaille désormais pour une entreprise de sécurité in­formatique israélienne. Il a été re­cruté en septembre 2019 par NSO Group pour - on ne rit pas -
protéger les libertés (Libération, 31/10/19). Or NSO est poursuivi par WhatsApp pour avoir permis l’es­pionnage d’activistes, de journalistes et... de diplomates. Mais ce n’est pas tout ! Araud, qui, pendant la campagne de 2017, s’était rapproché d’Emmanuel Macron, a repris du service pour le compte de Richard Attias et Associates, une entreprise en partie irriguée par des ca­pitaux saoudiens. La boite corn et événementiel, fondé par Richard Attias et son épouse Cecilia ex Sarkozy a été chargé par le ministères des affaires étrangères de la logistique du sommet Afrique-France 2020. Lequel se tiendra en juin à Bordeaux en présence d’Emmanuel Macon et d’une cinquantaine de chefs d’Etat africains.
Son Excellence Gérard Araud s’y occupera-t-elle de la sécurité des relations avec la presse ou des échanges diplomatiques ?

01/02/2020

Infiltration des services secrets belge

Des espions vende des renseignements


Le Comité R s’inquiète de possibles infiltrations étrangères des services secrets belges et souhaite examiner comment ces derniers sont en mesure de détecter ces infiltrations.
Une vingtaine d’incidents potentiels ont été répertoriés et sont à l’analyse. Quinze se seraient produits au sein du Service général du renseignement et de la sécurité (SGRS), le service secret de l’armée belge. Cinq incidents concer- nent la Sûreté de l’État.

C’est en tout cas ce qu’affirmaient samedi les quotidiens De Tijd et L’Écho, sur base d’une réunion à huis clos qui s’est tenue en décembre dernier au Parlement belge.
Le Comité R y a fait référence à son dossier “infiltration”.

Des dossiers à l’enquête


Selon les deux quotidiens, le Comité R “souhaite vérifier comment nos services de renseignement gèrent la découverte d’indices permettant de supposer que certains membres de leur personnel sont peut-être sous l’emprise d’autres pays et services de renseignements”.

La porte-parole de la Sûreté, Ingrid Van Daele, déclare “qu’en ce moment, nous n’avons connaissance d’aucun cas d’infiltration effective de la Sûreté de l’État”.

Aucun cas nouveau d’espionnage potentiel n’est divulgué.

Les parlementaires ont été informés du cas d’un capitaine commandant du SGRS à qui l’habilitation “Secret” a été retirée et qui a été licencié.

Recruté en 2004, cet homme travaillait pour la division du Renseignement (Div I) du SGRS. Il travaillait aussi dans l’import-export. Il avait notamment de nombreux contacts avec la Russie, en particulier avec un oligarque.

Un autre dossier plus délicat est sous enquête au parquet fédéral. Il concerne la mise à pied d’un major soupçonné d’avoir transmis en 2016 des informations sensibles à la Russie par l’entremise d’une femme travaillant pour les services secrets serbes.