Réunis en Suisse, les acteurs de ce marché n’apprécient pas que l’on s’intéresse à eux.
Maintenant, vous êtes invités à sortir. » « Arrêtez de héler les participants, sinon nous appelons la po- lice. » Les journalistes du Monde n’étaient clairement pas les bienvenus, mardi 5 juin, à la grande rencontre annuelle des vendeurs de passeports « en or ». Baptisée « Forum de la citoyenneté par l’investissement », cette conférence a réuni pendant trois jours à Genève les principaux acteurs de ce business contesté. En plein essor, il consiste à commercialiser auprès de super-riches du monde entier la citoyenneté de pays leur permettant de circuler plus facilement sur la planète.
Pour un montant allant de quelques centaines de milliers à 2 millions d’euros, ceux-ci peuvent notamment s’offrir des passeports d’Etats caribéens, de Chypre ou de Malte – qui permettent de voyager librement dans l’Union européenne (UE). Ce négoce jusqu’ici très discret fait l’objet depuis quelques mois de révélations inquiétantes dans la presse. Proches de Vladimir Poutine pourvus de passeports chypriotes ; Iraniens ayant acheté la nationalité de Saint- Kitts-et-Nevis (Caraïbes), pour échapper aux sanctions internationales ; contournement des règles européennes à Malte...
Ces scandales ont jeté un froid parmi les représentants gouvernementaux des pays vendeurs, les cabinets d’avocats et les experts de la vérification d’identité, qui avaient l’habitude de se retrouver en toute tranquillité dans le cadre luxueux du Grand Hôtel Kempinski, au bord du lac Léman. « Il y a beaucoup d’incompréhension de la part de la presse, qui est mal renseignée sur le sujet, déclare ainsi Bruno L’Ecuyer, directeur de la principale association professionnelle du secteur, organisatrice du forum. Les articles à charge et les gros titres font vendre, mais nous parlons ici d’une activité bénéfique pour les pays et les gens. Il ne faut pas ostraciser ceux qui investissent dans l’économie. »
Les scandales ont pourtant attiré l’attention de la Commission européenne et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui réfléchissent toutes deux à la façon de réguler ce secteur jusqu’ici très peu contrôlé. Les deux institutions s’inquiètent, notamment, du fait que ces passeports « en or » puissent servir à contourner des procédures fiscales ou judiciaires dans les pays d’origine. Mais Le Monde n’a pas pu assister à plus de deux heures de conférence. Les organisateurs ont notamment argué de discussions « trop techniques » et « confidentielles », ou d’articles trop critiques » pour nous laisser y assister.
Sur la défensive
Pas question, par exemple, de suivre les débats sur la question très sensible du contrôle des acheteurs de passeports, souvent issus de pays exposés au risque de corruption ou de blanchiment d’argent, à l’image de la Chine, de la Russie ou du Moyen-Orient. Grands pourvoyeurs de passeports, les pays caribéens sont particulièrement sur la défensive. Les cinq pays de la région qui ont ouvert leur nationalité à la vente utilisent en effet largement, comme argument de vente, les accords signés en 2009 et 2015 avec l’UE, permettant à leurs citoyens de circuler librement sans visa dans l’espace Schengen.
« Or, si Schengen fait pression, il faudra forcément qu’on change les programmes », redoute déjà Mark Scott, promoteur immobilier à Grenade. Cela ne sera pas facile, tant le marché des passeports est devenu crucial pour ces petits territoires insulaires. « Pour la Dominique, c’est 1 milliard de dollars caribéens, soit 25 % de notre PIB », explique Emmanuel Nanthan, représentant du programme sur l’île. Tout aussi inquiet, Dimitry Kochenov, professeur à l’université néerlandaise de Groningen et président du Forum de la citoyenneté par l’investissement, a carrément assimilé ce business à la défense de la démocratie libérale, dans son discours d’ouverture. « Notre secteur est menacé par la progression des populistes qui veulent juste être entourés des gens de leur village et geler le monde en empêchant les gens de vivre la vie qu’ils veulent dans un monde ouvert », s’est-il alarmé depuis la tribune de l’un des plus beaux hôtels cinq étoiles de Genève...
Ces scandales ont jeté un froid parmi les représentants gouvernementaux des pays vendeurs, les cabinets d’avocats et les experts de la vérification d’identité, qui avaient l’habitude de se retrouver en toute tranquillité dans le cadre luxueux du Grand Hôtel Kempinski, au bord du lac Léman. « Il y a beaucoup d’incompréhension de la part de la presse, qui est mal renseignée sur le sujet, déclare ainsi Bruno L’Ecuyer, directeur de la principale association professionnelle du secteur, organisatrice du forum. Les articles à charge et les gros titres font vendre, mais nous parlons ici d’une activité bénéfique pour les pays et les gens. Il ne faut pas ostraciser ceux qui investissent dans l’économie. »
Les scandales ont pourtant attiré l’attention de la Commission européenne et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui réfléchissent toutes deux à la façon de réguler ce secteur jusqu’ici très peu contrôlé. Les deux institutions s’inquiètent, notamment, du fait que ces passeports « en or » puissent servir à contourner des procédures fiscales ou judiciaires dans les pays d’origine. Mais Le Monde n’a pas pu assister à plus de deux heures de conférence. Les organisateurs ont notamment argué de discussions « trop techniques » et « confidentielles », ou d’articles trop critiques » pour nous laisser y assister.
Sur la défensive
Pas question, par exemple, de suivre les débats sur la question très sensible du contrôle des acheteurs de passeports, souvent issus de pays exposés au risque de corruption ou de blanchiment d’argent, à l’image de la Chine, de la Russie ou du Moyen-Orient. Grands pourvoyeurs de passeports, les pays caribéens sont particulièrement sur la défensive. Les cinq pays de la région qui ont ouvert leur nationalité à la vente utilisent en effet largement, comme argument de vente, les accords signés en 2009 et 2015 avec l’UE, permettant à leurs citoyens de circuler librement sans visa dans l’espace Schengen.
« Or, si Schengen fait pression, il faudra forcément qu’on change les programmes », redoute déjà Mark Scott, promoteur immobilier à Grenade. Cela ne sera pas facile, tant le marché des passeports est devenu crucial pour ces petits territoires insulaires. « Pour la Dominique, c’est 1 milliard de dollars caribéens, soit 25 % de notre PIB », explique Emmanuel Nanthan, représentant du programme sur l’île. Tout aussi inquiet, Dimitry Kochenov, professeur à l’université néerlandaise de Groningen et président du Forum de la citoyenneté par l’investissement, a carrément assimilé ce business à la défense de la démocratie libérale, dans son discours d’ouverture. « Notre secteur est menacé par la progression des populistes qui veulent juste être entourés des gens de leur village et geler le monde en empêchant les gens de vivre la vie qu’ils veulent dans un monde ouvert », s’est-il alarmé depuis la tribune de l’un des plus beaux hôtels cinq étoiles de Genève...
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